Le bon sens avant la méthode #PROductivity 5
Les méthodes permettent de mettre des processus en place de manière rationnelle. Il est particulièrement pratique pour un débutant de suivre un manuel et de mettre en place tous les éléments comme indiqué, surtout quand on n’a pas encore une vision complète de son outil. Par contre, une fois la méthode maitrisée, il est important de s’approprier les outils et de les faire siens.
“La raison est la seule chose qui nous rend hommes.”
René Descartes, Discours de la méthode
Que l’on parle de Lean, RUP, PMI PMP, Prince… l’avantage d’une méthode, même si on peut le critiquer, est de placer des normes et de permettre à tout le monde de parler le même langage. Toutefois, j’ai rencontré trop d’extrémistes de la méthode qui utilisaient un nombre de ressources non négligeable pour appliquer des processus qui ne leur étaient pas utiles au final, mais ils le faisaient : car cela était inscrit dans un livre.
Le bon sens est l’outil le plus important pour vous, et dans votre carrière. Lorsque vous sentez que la méthode devient une raison et n’est pas au service de l’entreprise, il est probablement temps de l’ajuster. Autrement dit, si la méthode est un frein à la performance, il est temps de l’adapter à vos besoins !
Le chef de projet (qui en plus de la gestion de différents projets) mesure 90 KPI (Key Performance Indicator) ; il y passe des heures et en est fier. Mais quel en est le but ? Le but d’un KPI est de mesurer, de prendre la température d’une partie de votre entreprise et au final de prendre des mesures pour corriger, améliorer son fonctionnement. Peut-on véritablement suivre 90 indicateurs et corriger sur 90 points en même temps ? Je pense que c’est inefficient.
Une autre façon d’aborder une situation où l’administration du processus n’est pas efficiente, est de se souvenir pourquoi on fait cela. À quoi et à qui servent ces indicateurs ? Quelle est leur valeur ? Qui lit ces mesures de performance? Dans mon expérience je suis toujours surprise par le nombre de fois où du travail comme celui-ci, qui a une réelle valeur sur le fond, est inutilisé. De quoi avez-vous vraiment besoin ?
J’ai mené nombre de développements en utilisant la méthodologie SCRUM… Cette dernière possède des caractéristiques très simples et utiles : tel que réaliser des blocs de travail nommé sprint qui sont de 2 à 4 semaines et calculer la vélocité de chaque sprint (la masse de travail fourni). Cela est particulièrement utile si vous avez des comptes à rentrer auprès d’un client qui vous a passé la commande de ce travail (facturation en régie). Toutefois dans d’autres cas, comme la réalisation de notre propre produit en mode SaaS, il y avait certaines caractéristiques qui nous encombreraient, les voici :
- Premièrement, nous n’avions pas envie de nous limiter à des périodes préalablement fixées à un certain nombre de semaines. Ce qui semblait important pour nous n’était pas d’être fidèle à un calendrier, mais d’ « amener de la valeur dans notre produit ». Partir du postulat « J’ai 2 semaines à dispo : que vais-je mettre dedans ? », nous paraissait erroné, nous lui préférons : « Je veux que mes utilisateurs puissent payer à la réservation ; combien de temps cela va-t-il prendre ? ». Et nous créons une Milestone de durée nécessaire : 1, 2, 3 semaine(s) ; par contre, nous gardons les enseignements qui nous paraissent fondamentaux et utiles pour nous, nous n’allons pas commencer à développer sur plus d’un mois sans faire une release.
- Deuxièmement, tout l’effort investi pour mesurer les tâches, en vaudrait-il forcément la peine ? Non, pas pour nous. Je ne dis pas que c’est pas utile dans l’absolu, mais ce n’était pas utile dans ce cas précis.
Le point de vue de la mesure de l’effort passé est très intéressant. Je me fais souvent demander : quels devraient être les bons ratios entre l’analyse, le développement et les tests dans les projets. Et ce, peu importe la méthode de gestion de projet. Mon avis est que l’étude de l’expérience passée ne peut s’avérer utile que si, et seulement si, c’est un projet identique, avec le même client et les mêmes équipes dans le même contexte. Dès qu’un paramètre change, l’expérience du passé ne peut être précise. Lorsque j’étais chef de projets, j’ai passé beaucoup de temps dans des fichiers Excel à tout calculer, analyser et tenter d’apprendre sur le passé pour mieux estimer. Ces efforts servent à donner un estimé qui fait plaisir au client et qui rassure la personne qui le donne, mais n’est jamais réaliste si ce n’est pas un projet identique.
Comment gérer les délais alors ? peu importe votre méthode de gestion de projet, la seule chose que j’ai vu qui fonctionnait vraiment, est le travail rapproché avec le client, les livraisons régulières et SURTOUT la clarté et les objectifs de ce que l’on a de besoin. Vous savez que vos clients vous demandent plein d’éléments qu’ils n’ont pas besoin, car ils savent qu’ils vont devoir couper ? et si on se disait les vraies affaires ?
Ce n’est pas votre entreprise qui doit s’adapter à la méthode, mais votre méthode qui doit s’y adapter pour vous fournir le meilleur retour sur investissement. Il n’y a que dans la phase d’apprentissage qu’il est utile de suive à la lettre les méthodes, une fois rendu dans le monde professionnel, il faut s’approprier les méthodes… ou en invente d’autres !
… sans oublier que le plus important est de comprendre pourquoi on fait tel ou tel projet. L’humain a besoin de comprendre pour agir.
Ce billet a été écrit en partenariat avec :
GENEVIÈVE DICAIRE
Coach professionnelle ICF, Auteure et Conférencière
Après plus de 15 ans dans le milieu de la technologie de l’information, Geneviève est passée d’experte à gestionnaire. Elle a découvert la puissance des outils de coaching et a fondé Unique coaching.